IN THE BEGINNING - AU DEBUT

Ecrit par Le Révérend Bill Shergold
Paru dans Link Magazine, novembre 1966
(traduction Martine Speisser)

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Un reporter de magazine m’a accusé d’avoir acheté une moto et un blouson de cuir uniquement pour attirer les jeunes dans mon Eglise.
C’est totalement faux. Je possédais déjà une moto longtemps avant que les blousons de cuir ne fassent fureur. En fait, l’équipement de mes débuts aurait certainement fait rire les motards d’aujourd’hui. Il se composait d’un béret vert, d’un long imperméable bleu de police et de bottes de pompiers, le tout acheté au surplus local.
Quant à ma moto, une BSA Bantam, je l’avais tout simplement achetée pour me déplacer dans ma paroisse qui était à cette époque dans une nouvelle zone d’habitation à côté de l’aéroport de Londres.
Eric Haul, un membre de notre club de jeunes, m’a appris à conduire sur sa toute nouvelle Douglas Dragonfly. Nous sortions tard la nuit afin que mes escapades passent inaperçues.
Puis j’ai décidé que j’étais prêt pour passer mon permis de conduire. J’ai échoué une  première fois à Ealing. L’inspecteur était une femme et je suis convaincu que ses bêtes noires étaient les vicaires et les motos ! Non seulement, elle me refusa le permis, mais pour enfoncer le couteau dans la plaie elle rajouta que j’étais une menace pour le public. Peut-être l’étais-je… Mais je l’ai obtenu la deuxième fois, de justesse, car je suis tombé en panne d’essence durant le retour ! On ne peut pas dire que cette époque de ma carrière de motocycliste ait été brillante.

La moto était un vrai four. Je ne peux pas me souvenir le nombre de fois que j’ai du la pousser de Hanworth à Twickenham pour que le vendeur constate les défauts de la machine. Un jour où j’essayais vainement de la kicker devant la maison d’un paroissien, un livreur de lait qui était en train de bavarder sur le pas de la porte se moqua : « dommage que les vicaires n’aient pas le droit de jurer ! » S’il avait su…
En me rendant à un mariage, la moto tomba en panne deux fois, et j’étais tellement mal à l’aise de devoir conduire la cérémonie avec les mains noires de graisse que j’ai décidé de revendre la moto et de retourner à mon vieux vélo. J’en avais tellement mare des motos à cette époque et je pensais ne jamais en ravoir.

La Mission Eton à Hackney Wick

J’ai tenu parole jusqu’en 1959 quand le bishop m’envoya à Hackney Wick pour m’occuper du collège Eton. C’était une très grande et très vivante paroisse, et il est vite devenu évident qu’il me fallait un autre moyen de transport. Comme je n’avais jamais appris à conduire une voiture, j’ai décidé de retenter ma chance et d’acheter une deuxième moto. Cette fois, c’était une BSA C15 seconde main. Peut-être cela aurait été plus digne pour un pasteur d’âge moyen d’acheter une voiture et d’apprendre à la conduire. Mais la suite en a décidé pour moi…  Je me rappelle cet évènement très nettement.
Nous étions en train de déjeuner dans le presbytère lorsque le téléphone sonna. Un petit garçon de notre école du dimanche était en train de jouer dans une zone qui avait subi des bombardements et un énorme bloc de béton lui était tombé sur la tête. Il était gravement blessé et ses parents voulaient qu’un prêtre vienne à ses côtés tout de suite. Je savais que je devais y aller en moto, c’était évident. Mais Brentwood était loin de Hackney et cela signifiait que je devais descendre l’avenue Eastern, renommée pour sa circulation difficile. Je n’avais pas le temps d’hésiter, et je me mis en route de suite. C’était un cauchemar de conduire dans ces conditions pour quelqu’un d’inexpérimenté, mais je suis arrivé et j’ai pu prié avec le jeune garçon. Contre toute attente, le jeune garçon guérit d’une façon remarquable.

De retour sain et sauf à la mission Eton, un étrange sentiment d’exaltation m’envahit. Non seulement j’avais vaincu ma peur de la circulation, mais ma moto m’avait servi à accomplir mon devoir de pasteur. Le lendemain matin à l’office, j’ai délibérément choisi d’offrir ma moto à Dieu et Lui ai demandé d’en faire usage pour son compte. C’était une prière qui a été exaucée d’une façon dont je n’aurais pas pu mieux rêver. Durant les deux ou trois années suivantes, j’ai utilisé ma moto pour aller et venir dans ma paroisse, mais l’idée ne m’était jamais venue qu’un jour j’aurais pu créer un club motocycliste. La plus grande partie de mon temps était consacrée au club de jeunes qui venait juste d’être créé par le Révérend John Oates. Peut-être devrais-je dire un mot à propos de ce club, car il répond à la question pourquoi le club s’appelle le  « 59″ ?
Le club que nous connaissons maintenant sous le nom de « Club 59 » a été créé en 1962 en tant que section du Club 59 déjà florissant de la Mission Eton qui était le club que nous avions créé en janvier 1959 avec Cliff Richards comme invité d’honneur.
Nous l’avons appelé le Club 59 parce que nous voulions sortir de l’image plutôt vieillote du traditionnel club de jeunes paroissial. Ce club a rencontré un vif succès dès le début, et beaucoup de stars réputées sont venues nous rendre visite. La soirée la plus fabuleuse de toutes fût celle où la Princesse Margaret et son mari ainsi que Cliff Richard et les Shadows, sont venus nous rendre visite.
A cette époque, le virus de la moto m’avait réellement atteint. J’ai troqué ma C15  pour une Speed Twin de 1959 et j’ai commencé à apprécier les frissons de la moto. J’ai même acheté un casque de style police et un blouson de cuir trois-quart. Puis un jour, j’ai lu dans les journaux qu’un office spécial pour les motards avait été célébré dans la toute nouvelle cathédrale de Guilford. J’ai trouvé cela plutôt étrange parce que généralement les cathédrales donnent un sentiment de respectabilité, mais cela me donna une idée. Si Guilford pouvait le faire, pourquoi est-ce que Hackney Wick ne le pourrait pas ?

Pourquoi ne pourrions nous pas avoir un rassemblement des motards du nord et de l’est de Londres à la Mission ?
Pour la première fois de ma vie, j’écrivis un courrier à une revue de moto, demandant si quelqu’un serait intéressé par un tel office. L’éditeur, Harry Louis, le publia et presque immédiatement je reçus une lettre de Bob Matthews, secrétaire général du Triumph Owners Club, disant qu’il pensait que c’était une bonne idée et  qu’il aimerait m’aider à organiser cet évènement. Il était hospitalisé à ce moment, je suis allé le voir pour en discuter ensemble. J’ai provoqué un petit incident à l’hôpital en roulant avec ma moto dans une descente d’égout d’eau de pluie et en éclaboussant. Bob m’a envoyé à la section Londonienne Nord du club Triumph Owners Club qui à cette époque avait son quartier général dans une maison de réunion Quaker à Stoke Newington.Je serai toujours reconnaissant aux membres du TOMC pour la façon dont il m’ont accueilli et ont supporté mes idées. Jusqu’à ce moment, j’avais toujours été un motard solitaire, maintenant avec les réunions du vendredi soir à Stoke Newington, j’appréciais pour la première fois la fantastique camaraderie du monde de la moto.

Pendant ce temps, les plans prenaient doucement forme pour notre grand évènement qui était maintenant fixé à un dimanche du mois de mai 1962. Nous nous étions assurés du concours de l’officier local de la sécurité de la route et nous avions envoyé des douzaines de circulaires à tous les clubs moto de la région. C’est alors que surgit un évènement qui eut des répercussions profondes sur tout le déroulement de la suite à venir.
Un jour, alors que je discutais de l’office avec certains des membres du Triumph Owners Club, quelqu’un me dit :
« Bien sûr, les gens que tu dois réellement inviter à l’office sont les jeunes hooligans qui font hurler leurs motos le long de la North Circular Road (périphérique nord de Londres). »
– C’est très bien– dis-je,  mais je ne connais pas un seul d’entre eux. Comment puis-je faire leur connaissance ?
– Si tu veux réellement les rencontrer, tu devrais faire un tour du côté de l’Ace Cafe.
– OK , je vais y aller. »

Jusqu’à présent, nous avions uniquement pensé à inviter les membres des hautement respectables clubs de motos à notre office. L’autre aspect du monde de la moto m’était totalement inconnu. Je me souvins cependant d’un article de magazine que j’avais lu les années précédentes, alors que j’attendais pour me faire couper les cheveux. C’était le genre d’article que l’on rencontre de temps en temps dans la presse américaine, décrivant les activités des Hells Angels, abondamment illustré de photos prise à l’Ace. Ce n’était certainement pas fait pour inspirer confiance à quelqu’un qui devait aller à l’Ace pour la première fois. Plus j’y pensais, plus je redoutais d’y aller.
Je choisis d’aller à l’Ace un samedi après-midi. Si j’avais davantage connu les habitudes des jeunes motards, je n’aurais certainement pas choisi ce moment. L’Ace est à 13 miles (20 km) de Hackney Wick et je pris la route avec plusieurs posters roulés et attachés à l’arrière de ma moto, en espérant que je pourrais persuader les propriétaires d’en afficher un.
Me demandant quel genre d’accueil me serait réservé, j’enroulais un foulard autour de mon cou afin de cacher ma collerette.
Juste après Staple’s Corner, je croisais environ une douzaine de motos rugissantes chevauchées par des personnages au look sinistre en blouson de cuir, qui allaient dans la direction opposée.
J’étais mort de peur. Au moment où je passais en dessous des ponts de Stonebridge Park, j’étais tellement paniqué que j’accélérais à fond et m’enfuyais de l’Ace aussi vite que je pouvais. Je réalisais alors que j’étais en train de devenir un trouillard. Aussi, au prochain carrefour, je fis demi-tour. De nouveau, la panique me gagna et je passais devant l’Ace sans m’arrêter, je fis demi-tour une deuxième fois et finalement j’entrai dans la cour.
A ce moment, l’Ace était pratiquement désert, je commandais une tasse de thé et m’assit pour la boire, mon visage cramoisi d’embarras. Je pris le chemin du retour sans m’être débarrassé d’un seul poster, mais je me consolais en me disant que j’avais enfin pénétré dans la tanière du lion, même si les lions étaient en fait en train de rôder ailleurs à la recherche d’une proie.
Plusieurs semaines s’écoulèrent avant ma nouvelle tentative pour retourner voir les garçons à l’Ace.

Ce fût seulement la nuit de la veille de l’office que je réunis tout mon courage pour y retourner. Cette fois, je ne cherchais pas à cacher ma collerette et j’y allais armé d’un paquet d’imprimés sur lesquels on pouvait lire : « Ceci est une invitation personnelle pour VOUS, pour vous rendre à l’église dimanche prochain pour assister à une messe spéciale pour les motards. »
Il devait être à peu près 8 heures le soir lorsqu’une nouvelle fois j’entrais dans la cour de l’Ace. La cour était remplie de motos, des centaines de garçons tournaient en rond, riant et discutant.
« Cela y est, j’y suis ! » pensais-je,  « je risque certainement de perdre mon pantalon ou d’atterrir dans le canal. » Je me dirigeai vers le groupe le plus proche et allai directement au vif du sujet :  « Je voudrais que vous veniez tous à l’église demain ».

Lorsque j’y repense, je m’étonne moi-même de mon sang froid, moi, un homme d’église d’âge moyen, envahissant la forteresse d’un des groupes de jeunes les plus coriaces de la région. Il n’y eu aucun rire, aucune plaisanterie, à la place il vinrent tous se presser autour de moi, me bombardant de questions : « Quelle est la raison ? Ou est-ce ? Comment y aller ? Quelqu’un m’apporta une tasse de thé. Je ne suis jamais entré à l’intérieur de l’Ace car ils venaient tous pour parler avec moi dehors. C’était la soirée la plus fantastique que j’ai jamais connue. A minuit j’ai réussi à m’échapper pour aller dormir un peu avant de terminer les dernières préparations pour la messe de trois heures le lendemain…
Et quelle messe ce fût ! Quelques jours avant j’avais publié une sorte d’article de presse en espérant que les journaux nous feraient de la publicité et nous assureraient une assistance suffisante. Seul un journal l’a publié avant la date, mais tous les autres étaient présents sur place le jour même, je suppose qu’il devait y avoir une pénurie de crimes ou de crises internationales ce week-end.
De plus, la BBC et ITV envoyèrent des équipes de journaux télévisés et je crois qu’il y avait une équipe pour les actualités aussi.
Le thème de l’office était que nous devrions consacrer nos motos ainsi que nous-mêmes au service de Dieu, en faisant notre possible pour utiliser les motos d’une façon responsable. Dans mon sermon, je comparais le motard d’aujourd’hui aux chevaliers anciens, je suggérais que nous devrions soutenir les mêmes idéaux de courage, courtoisie et chevalerie.

Nous avions eu l’idée de mettre différentes motos à l’intérieur de l’église pour symboliser l’offrande de nos motos à Dieu. C’était un étrange spectacle que de voir un scooter Tina à côté d’un Norton Manx qui avait couru le précédent week-end. En y repensant, je pense que cela a du être interprété comme une astuce publicitaire, je n’ai jamais eu l’intention de le faire dans ce sens. Les gens apportent des choux et des courges pour la fête de la moisson et personne ne s’en plaint. Il me semble à moi parfaitement naturel pour ceux qui aiment les motos de les amener dans la Maison de Dieu. Je ne sais pas comment nous avons pu aller jusqu’au bout de la célébration de la Messe. Il y avait des photographes et des cameramen partout.
L’église ressemblait à un studio de tournage avec tous les projecteurs et les fils électriques qui traînaient par terre. Cependant, malgré toutes ces distractions, il y avait une merveilleuse atmosphère de vénération et de respect religieux.

Le jour suivant, les journaux ne parlaient que des évènements de Hackney Wick.
Voici quelques grands titres : Les Chevaliers Errants de 1962 – Les Jeunes Ton-Up Boys(*) à l’Eglise – Les Motos des Ton-Up Boys sont Bénies –  Les Photos de la Bande des 100 Miles/heure qui peuvent provoquer une Tempête – Bénédictions par le Ton – Un Vicaire Bénit les Ton-Up Boys.
Un des journaux appela même l’Evêque de Londres à minuit pour lui demander ce qu’il pensait de tout cela !!
(*) Un Ton-Up Boy est un jeune qui durant les courses d’un café à l’autre dépassait 160 km/heure équivalent de 100 miles/heure.

Le mardi, plusieurs journaux publiaient des dessins humoristiques dont le plus célèbre avait été dessiné par Giles dans le Daily Express. J’ai écrit au journal et j’ai dit à Giles combien j’aimais son dessin et à mon grand plaisir il m’a envoyé le dessin original signé de sa main.
C’est une des choses que je possède qui a le plus de valeur pour moi, elle occupe la place d’honneur dans mon bureau. J’étais un peu accablé de toute cette publicité, mais pour moi cela représentait un grand avantage. Je n’en avais rien à faire d’avoir mes photos dans les journaux, ce à quoi j’attachais le plus d’importance, c’était cette fameuse nuit où j’avais fait la connaissance des jeunes à l’Ace qui étaient devenus mes amis.
Les coupures de presse et les photos s’accumulaient à la Paroisse, j’en fis un paquet que j’emmenais à l’Ace pour les montrer aux jeunes qui étaient ravis d’avoir une « bonne presse » pour une fois !! Ils n’avaient connu jusqu’à présent que des articles défavorables.
Je suis devenu rapidement un habitué de l’Ace et je fis plus ample connaissance avec les jeunes. L’un d’entre eux m’invita même chez lui pour déjeuner avec sa famille. D’autres commençaient à me parler de leurs amis qui étaient à l’hôpital.
A cette époque, je recevais aussi un courrier considérable, une partie me complimentant, l’autre partie moins gentille. Une lettre anonyme m’avertit des conséquences désastreuses qui s’ensuivraient si je continuais à fréquenter ces jeunes voyous en blouson de cuir.

A partir de ces lettres, mais surtout de mes conversations avec les jeunes eux-mêmes, je commençais à réaliser qu’ils étaient des exclus de la société. A cause de leur façon de s’habiller, de leur motos bruyantes et de leur tendance à se déplacer en bandes, personne ne voulait d’eux. Les salles de danse les refusaient, les bowlings leur demandaient de rentrer chez eux et de revenir en tenue convenable. Les Clubs de Jeunes avaient peur d’eux .
Même les cafés de routiers n’appréciaient pas leur clientèle. Après tout, un conducteur de moto consomme en moyenne une tasse de thé et un coca toutes les deux heures alors qu’un conducteur de poids lourd ou de car dépense 5 schillings pour un repas et reprendra la route au bout de 30 minutes. J’étais de plus en plus convaincu que ce dont ils avaient besoin était une nouvelle sorte de club qui mixerait la touche personnelle et amicale d’un club de jeunes avec l’atmosphère libre et décontractée d’un café routier ou d’un coffee bar.

La difficulté était que les locaux de la Mission Eton étaient déjà exploités à presque 100 % et Hackney Wick était un endroit tellement difficile à trouver avec son labyrinthe de sens interdits que je doutais vraiment que cela soit possible. Je décidais quand même d’essayer.
Il se trouvait que l’anniversaire des vingt ans de mon ordonnance de prêtre approchait. Au lieu de le fêter avec les paroissiens, je décidais de faire une fête avec mes amis de l’Ace. Ce fût un énorme succès, quatre-vingt d’entre eux vinrent et cela prouva que la saturation des locaux de la Mission Eton n’était pas un obstacle.
A ce moment, j’eus la chance de rentrer en contact avec deux clubs de motos et les deux étaient réellement intéressés par mes plans pour créer un nouveau club. Je me souviens très bien avoir été abordé par Mick Ingarfield du « Friendly Club » (Club Amical) dans la cour de l’Ace, il m’invita à venir à leur QG à Hammersmith pour rencontrer leurs membres. A cette époque, je rencontrais également Garth Pettitt du Club Sunbeam. Garth est une personne étonnante, il a un haut poste dans l’administration mais ne pense à rien d’autre qu’à arriver à la réception du Manoir avec sa Norton SS et de changer sa tenue de cuir dans les toilettes.
Ces deux clubs étaient énormes et je ne pourrais jamais leur rendre à part égale le support qu’ils m’ont apporté dans mes débuts. Nous avons décidé d’essayer de faire quelque chose les samedi soir, le seul moment où les salles n’étaient pas utilisées, et de lancer le nouveau club en octobre 1962.

En fait, nous n’avons jamais eu l’intention que cela soit réellement un club, ainsi qu’en témoigne le surnom amical de  « Vicar’s Caff » (Café du Vicaire) qui lui a rapidement été donné. La difficulté à trouver une personne qui puisse correspondre au monde des motards pour ouvrir le club a été solutionnée durant une de mes visites hebdomadaires à l’Ace. J’étais assis à une table, en train de boire un thé, lorsque j’ai remarqué à la table d’à côté un « gentleman » de proportions plus que généreuses. Je n’ai jamais découvert comment il avait pu se glisser dans ces amusantes chaises pivotantes. Il était évident qu’il débordait de curiosité et au bout d’un moment, il n’a pas pu se retenir plus longtemps et se présenta comme « Harold Harvey » et me demanda s’il pouvait voir les photographies. Il était photographe et allait souvent aux courses de motos pour prendre des photos. Il disait qu’il serait capable de trouver quelqu’un qui pourrait nous correspondre. Le résultat de cette rencontre faite par hasard a été que non seulement le Club a eu la participation de Alf Hagon (pilote moto) pour la nuit d’inauguration, mais le club a également eu la coopération pour la première fois d’une personne adulte. Je voudrais insister sur l’importance de la contribution de Bob Harvey pour le club depuis sa participation.

De façon à faire connaître notre soirée d’inauguration le plus possible, nous avions préparé des prospectus que je distribuais dans des endroits tels que le Busy Bee, le Dug-Out, Woodlands, Johnsons et bien sûr à l’Ace. Je n’ai jamais été à l’aise lorsque je rentrais pour la première fois dans un café, mais pour le Busy Bee j’eus de la chance. Une chaîne de télévision allemande tournait un film documentaire sur la jeunesse anglaise et m’avait demandé de les mettre en contact avec des jeunes motards. Je me suis tout de suite rendu au Busy Bee pour trouver des jeunes pour le tournage du film. Je n’eus plus jamais eu besoin de me faire connaître au Busy Bee. Nous avons passé des heures à tourner le film et les jeunes ont passé un merveilleux moment. Je n’oublierai jamais les trois motos roulant de front sur la rocade de Watford à une heure du matin avec les caméras nous filmant de l’arrière d’un van avec des énormes projecteurs qui nous aveuglaient.

Nous devons remercier le Daily Mirror pour nous avoir fait de la publicité bien utile à cette époque. Parmi les nombreuses lettres que j’ai reçues, une venait d’un motocycliste américain passionné qui m’adressait une prière, tapée à la machine, qui était très pratiquée par les membres de son club. J’en fis un résumé et l’imprimai sur des cartes de taille à pouvoir être mises dans un porte-feuille. Le problème était de les distribuer. J’ai toujours répugné à utiliser mon amitié avec les jeunes motards des cafés pour leur imposer la religion, alors j’ai hésité à leur donner directement moi-même. Au lieu de cela, j’en ai envoyé une au Daily Mirror qui a eu la gentillesse de la diffuser « à la une ». Je reçus des demandes de tout le pays. La demande la plus amusante venait d’un moniteur d’auto-école qui me demandait 50 copies pour donner à chaque motard qui se présentait pour passer son permis. 

L’article paru dans le Daily Mirror fut aussi l’occasion d’un autre dessin humoristique à mon encontre. Cette fois, c’était avec une femme, mais pas une très jolie. Elle conduisait un side-car alors que j’étais perché dangereusement sur une chaire gothique. Je m’adressais aux motards qui passaient au moyen d’un mégaphone en guise que porte-voix. La légende disait : « Je dirais une chose concernant le vicaire : Il est vraiment déterminé de parvenir jusqu’à eux ». On peut dire que le message a certainement été bien reçu. Nous avons eu une participation d’une centaine de personnes pour notre soirée d’inauguration au mois d’octobre.

Ils étaient les premiers de ce qui deviendrait des milliers et ils étaient présents aux modestes débuts de ce qui devait bientôt devenir le plus grand club de motos que le monde ait jamais connu.